samedi 17 mai 2008

Les femmes du président : Cindy McCain, Michelle Obama, portraits de femmes… de présidentiables !

Alors que la campagne pour les primaires est dorénavant pliée pour John McCain, Michelle Obama est à nouveau dans les starting blocks, destination : Puerto Rico où se tiendra une nouvelle primaire le 1er juin prochain qui pourrait bien, avec ses 63 délégués, enfin clore la campagne démocrate. Femme de tête au caractère bien trempé, Michelle Lavaughn Robinson, 44 ans, avocate renommée et épouse du candidat démocrate depuis 1992, suscite commentaires passionnés et interrogations légitimes. Elle nous permet, surtout, d’envisager cette question fondamentale : qu’attendent exactement les Américains de leur first lady ?

" Foxy ladies " ou " pancake mummies " : quelles premières dames Cindy et Michelle feraient-elles ?

Pendant la première campagne présidentielle de Bill Clinton, l’aspirante première dame d’alors, aujourd’hui en course pour la nomination démocrate, s’était attirée les foudres d’une bonne partie de l’opinion américaine, en tout cas des femmes au foyer qui avaient fait le choix de ne pas travailler, en déclarant qu’elle n’envisageait pas de " rester à la maison pour faire des cookies et recevoir pour le thé…." Vision apparemment partagée par Michelle Obama…davantage que par Cindy Mc Cain. Des origines que tout oppose, des conceptions du " premiership " contradictoires, il y a pourtant un point qui les rassemble : leur " sex appeal " évident. La référence suprême en matière d’élégance –apparemment même en France- à savoir Jackie Kennedy se voyait mère et épouse avant d’être première dame. Autres temps, aures mœurs ? Pas vraiment, tant le critère de séduction et de charme reste au cœur des préoccupations dès lors qu’il s’agit d’envisager quel modèle de première dame Cindy et Michelle ont à proposer.
Cindy Lou Hensley, seconde femme du candidat républicain, fille de millionnaire et ancienne reine de beauté n’a de ce côté là rien à envier à celle que l’on a surnommée, par un raccourci un peu facile, la " Jackie Kennedy noire" attendue et rêvée par tant d’Américains. Mais attend-t-on seulement de ces " foxy ladies " (en argot américain : " filles sexy ") qu’elles soient belles et se taisent ? Il est vrai que les exemples de premières dames réellement impliquées dans les affaires politiques dans l’histoire américaine récente sont rares : Eleanor Roosevelt, bien sûr…et après ? " Pat " Nixon, Barbara puis Laura Bush : de parfaites maîtresses de cérémonie à la Maison Blanche comme Jackie Kennedy en effet.

Hillary Clinton avait pour sa part payé cher ses considérations culinaires. Paradoxe contemporain, les Américains aiment l’idée d’une première dame intellectuellement brillante, dynamique et impliquée.. . tant que ça n’enfreint pas des règles par trop codifiées de tenue rhétorique élémentaire. Si Michelle Obama, fille de la méritocratie américaine (mère secrétaire, père employé municipal), forçait l’admiration quand elle répondait à Larry King en février dernier sur CNN : " Je me dis, quelle opportunité ! Quelle plate-forme j'aurai, en principe, pour aborder tout un tas de questions qui pourraient avoir un effet sur le pays. Quel privilège d'avoir la possibilité de m'adresser aux cœurs des gens et de contribuer à faire bouger ce pays dans une direction différente ", son caractère bien trempé lui a valu bien des tours en début de campagne, et on l’accuse facilement d’élitisme, reproche connu et enduré par Hillary Clinton avant elle. Première grosse gaffe de campagne, elle a payé cash sa phrase répétée à l’envie "pour la première fois de ma vie d’adulte, je suis fière de mon pays". Réponse immédiate de Cindy : " moi aussi je suis fière de mon pays, j’en suis très fière". Cette dernière souhaite jouer un rôle plus " traditionnel " en tant que première dame et sa campagne actuelle le laisse en effet présager. Elle donne beaucoup moins d’interviews que Michelle, ne donne pas de discours d’une heure sans notes comme le fait sa rivale, véritable " natural born orator " ! Elle fait donc moins peur, notamment à l’électorat plus traditionaliste et conservateur, qui frémit quelque peu, aussi, bien qu’il soit difficile de l’admettre ouvertement aux sondeurs, à l’idée d’une photo de famille noire à la Maison Blanche. Michelle a en tout cas retenu la leçon et sait également présenter une image plus adoucie.

" stand by your man " : des trajectoires de campagne différentes, des passages obligés

Outre l’élégance requise, on attend aussi d’une première dame une affirmation des valeurs familiales (elles sont toutes deux de bonnes mères de famille, point d’inquiétude de ce côté-là donc !) et un soutien indéfectible, évidemment, envers son époux. " Je n'ai rien calculé, je n'ai rien prévu (…) Je suis donc la première dame jusqu'à la fin du mandat de mon mari, et son épouse jusqu'à la mort. " Cindy, Michelle ? Non, Carla Bruni-Sarkozy, répondant à Christophe Barbier (L’Express) sur son rôle de première dame de France le mois dernier ...
Soutien financier, d’abord, pour Cindy dont la fortune personnelle, familiale, a fortement aidé son mari dans sa campagne pour le poste de gouverneur d’Arizona d’abord, puis lors des primaires républicaines de 2000. En matière d’argent, Michelle Obama soutient elle son mari de façon diamètralement opposée en mettant en avant , à l’inverse, ses origines modestes (ils vivent toujours dans les quartiers noirs au sud de Chicago) tout en ayant pris un congé sans solde cette année pour suivre son mari en campagne. " Stand by your man ", donc, comme le chantait Tammy Wynette en 1968, ou comment rassurer le bon peuple par l’affirmation du couple. Comme Hillary Clinton (encore elle !) avait dû le faire exactement 10 ans plus tôt, en 1998, Cindy McCain a inauguré l’année 2008 en affrontant les médias suite aux révélations du très sérieux " New York Times " sur une probable liaison entre John et une jeune lobbyiste, Vicki Iseman. Et si ses interviews officielles sont plus rares il est vrai, elle n’en reste pas moins aux côtés de son candidat de mari qui continue à sillonner les routes américaines, de meeting en discours, de primaires en tournages de spots télévisés bien que sa nomination soit désormais officielle depuis deux mois. Même sacerdoce pour Michelle, bien que la nomination se fasse attendre, son rôle, à l’inverse de Cindy McCain, est plus que jamais primordial puisque le moindre faux pas, la moindre déclaration se voient commentés et disséqués par des médias aux aguets. Celle que l’on a surnommée "the Closer", celle qui conclut l'affaire doit bien prendre garde à ne pas introduire de vice de forme…
Trajectoires croisées, destins en suspens on ne peut plus fascinants, et pourtant, l’attention médiatique se porte tout autant si ce n’est même davantage sur un troisième personnage, pour le moins central dans cette campagne… Bill Clinton " himself " !

" First man Bill ! "

Une enquête récente du Centre de Recherches Pew indique que la couverture médiatique consacrée à l’ex-président est presque quatre fois plus grande que celle dévolue à Cindy McCain et Michelle Obama combinées.* Il a bien sûr droit au même lot de galéjades que celles entendues au sujet de François Hollande si Ségolène en était venue à l’emporter mais le sujet est sérieux, du moins sur le plan de la langue, car si la " first lady " se voit linguistiquement reconnue, comment désigner, chose jusqu’alors inédite, le mari de la présidente ? Très certainement par le terme officiel de " first gentleman " actuellement attribué aux quelques époux de femmes gouverneurs. La chose linguistique étant réglée, il lui restera à se faire à l’idée ! a ce jour, encore 64% des électeurs démocrates veulent qu’Hillary reste en course ! (Sondage ABC News/Washington Post du 12 mai 2008 ). Une chose est sûre, s’il ne fait pas de pancakes et autres cookies pour les équipes de campagne, il mouille en tout cas la chemise pour aider Hillary à vaincre l’irrésistible ascension de Barack Obama .

Mais la course à l’investiture n’est pas un long fleuve tranquille et il devrait prendre garde, lui aussi, à ne pas porter ombrage à la campagne de sa femme. Ainsi a-t-il déclaré lors d’une rencontre d’anciens combattants il y a quelques semaines: "je pense que ce serait bien si on avait une élection où vous avez deux candidats qui aiment leur pays et sont dévoués aux intérêts du pays", accusant assez explicitement Obama de ne pas être suffisamment patriote. Critique indigne, outrageante et avant tout déloyale, il confirme des inquiétudes partagées au sein même du camp démocrate pro-Hillary quant à son implication souvent trop visible dans cette campagne et rend plus aisée la contre-attaque sur le thème de la dynastie clintonienne. Elément qui rassurera finalement les défenseurs de la parité absolue, en politique comme ailleurs, il devra lui aussi, apprendre parfois à se taire en attendant la convention démocrate de Denver en août prochain.

* Enquête du Pew Research Center publiée le 14 mai 2008 comprenant 298 " news stories " pour Bill contre 78 pour les deux autres personnalités entre le 1er janv. et le 11 mai 2008.





Aucun commentaire: